Attention et conscience

L’acte d’attention consiste à rassembler toutes les ressources énergétiques de l’esprit en un seul point (ekagrata) afin qu’il y ait une attention vers une chose en particulier. Il ne fait aucun doute qu’un tel ancrage de l’esprit en un seul endroit, apporte clarté de perception et clairvoyance. Patanjali appelle cela Dharana. Cependant, lorsqu’il y a connaissance du « tout » et pas seulement d’une partie, nous l’appelons conscience. Patanjali appelle cela Dhyana.

Dhyana est le flux ininterrompu de la cognition menant au Samadhi, la conscience du tout. Les sages ont utilisé la métaphore de verser de l’huile d’un récipient à l’autre plutôt que de verser de l’eau. Le mot cognition désigne l’action mentale ou le processus d’acquisition de connaissances et de compréhension par la pensée, l’expérience et les sens. Dans la vie extérieure de tous les jours, les sens sont utilisés pour le bhoga, la consommation d’expériences. Dans dhyana, les sens sont utilisés pour Apavarga, c’est-à-dire pour l’apprentissage, l’éducation et la liberté de connaissance de soi. Le choix existe toujours quant à comment et pourquoi nous utilisons les sens.

Attention et conscience sont très difficiles à mettre en action simultanément. C’est-à-dire que lorsqu’il y a attention, nous perdons la conscience de l’ensemble ou de la vision globale, et vice versa. Si l’on demande de garder l’attention sur les omoplates par exemple, l’esprit perd conscience du reste du corps. Et quand il y a conscience et élargissement de la vision intérieure, l’attention est perdue au niveau des omoplates. De même, lorsque nous sommes conscients de l’unité de la vie dans cet univers, nous avons tendance à oublier nos responsabilités dans ce monde. Lorsque nous essayons de remplir nos responsabilités mondaines, nous avons tendance à oublier l’unité de la vie. L’attention est le mouvement vertical de l’intelligence intérieure, tandis que la conscience est le mouvement horizontal de l’intelligence intérieure. L’attention est une transformation personnelle, tandis que la conscience est une transformation sociale à travers les relations. Lorsque ces deux mouvements sont mis en synergie et synthétisés, il y a une action totale, apportant l’expérience et le sentiment du samadhi. Patanjali appelle cette synthèse Samyama.

Sutras de référence

देशबन्धश्चित्तस्य धारणा॥१॥

deśa-bandhaścittasya-dhārana 3.1

L’ancrage de l’esprit en un seul endroit est dharana. 3.1

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तत्र प्रत्ययैकतानता ध्यानम्॥२॥

tatra-pratyayaikatānata-dhyānam 3.2

Dhyana est le flux ininterrompu de la cognition de l’esprit. 3.2

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तदेवार्थमात्रनिर्भासं स्वरूपशून्यमिव समाधिः॥३॥

Tadeva-arthamātra-nirbhāsam-svarūpa-shūnyamiva-samādhiḥ 3.3

Samadhi, c’est quand ce dhyana brille alors que l’esprit perd son emprise sur ses propres images projetées et que seul l’objet observé reste. 3.3

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संयमः॥४॥

trayamekatra-saṃyamaḥ 3.4

La synthèse de ces trois est Samyama. 3.4

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प्रकाशक्रियास्थितिशीलं भूतेन्द्रियात्मकं भोगापवर्गार्थं दृश्यम् ॥१८॥

prakāśa-kriyā-sthiti-śīlaṃ bhūta-indriya-ātmakaṃ bhoga-apavarga-arthaṃ dṛśyam 2.18

Le connaissable ou le vu se compose des 5 éléments (prithvi, apa, tejo, vayu, akasha) et des 5 sens (rupa, rasa, sabda, gandha, sparsha) et est de la nature de la lumière (sattva), de l’activité (rajas ) et de l’inertie (tamas). Son but est de donner une expérience sensuelle et la libération. 2.18